Les pyramides ne bougent pas, mais les certitudes, elles, vacillent. Voyager en Égypte, ce n’est plus tout à fait ce que cela a été. Le pays des pharaons, longtemps synonyme de rêve et d’aventure, voit son image écornée par des risques bien réels, trop souvent minimisés ou ignorés. Que s’est-il vraiment passé pour transformer cette destination mythique en terrain miné pour les voyageurs ?
L’instabilité politique et ses corollaires
Le printemps arabe a laissé des traces profondes dans la vie quotidienne égyptienne. L’agitation politique n’a pas cessé depuis, et la société en subit encore les secousses. Chômage qui grimpe, économie qui patine : tout concourt à nourrir une frustration collective. Les divisions entre dirigeants s’enlisent, sans qu’aucune politique de relance ne vienne ranimer l’espoir.
Au fil des semaines, la population descend dans la rue, parfois à l’unisson, souvent en colère. Ces manifestations, surtout le vendredi après la prière de midi, ne dégénèrent pas toujours, mais le risque demeure bien réel. Les forces de l’ordre, sur les dents, répriment sans ménagement. L’ambiance devient électrique, la tension palpable. Dans ce climat, les comportements déviants se banalisent et s’infiltrent même là où l’on ne les attendait pas il y a encore quelques années.
La criminalité
Pour un touriste, profiter de l’Égypte en toute quiétude relève désormais du défi. Les menaces sont multiples, et parfois violentes, surtout envers les visiteurs occidentaux. Les vols à l’arraché se multiplient, les sacs disparaissent en un clin d’œil, et les braqueurs, souvent armés, n’hésitent plus à recourir à la violence.
Un trajet dans le métro, une balade dans un marché : les pickpockets sont partout, et le moindre relâchement peut coûter cher. Mais certains font face à bien pire. Les cambriolages à domicile, parfois menés par des groupes armés, ne sont plus rares. L’utilisation d’armes blanches est monnaie courante pour dépouiller les victimes. Les voitures, qu’elles soient de sport ou utilitaires, sont régulièrement détournées. On comprend vite pourquoi rouler la nuit est fortement déconseillé sur place.
Le traitement réservé à la femme
Les femmes, en particulier, se heurtent à une réalité difficilement admissible. Dans l’espace public, elles subissent des moqueries, des propos déplacés, des gestes intrusifs. Les regards appuyés, le harcèlement, et parfois même les coups ou attouchements, témoignent d’un climat hostile et pesant.
Lors de manifestations ou de rassemblements, le risque d’agression sexuelle grimpe en flèche, surtout lors des jours fériés. Se retrouver encerclée dans la foule peut tourner au cauchemar. Ce n’est plus seulement une question d’inconfort, mais une véritable mise en danger.
La menace terroriste
La présence de groupes terroristes reste une réalité dans plusieurs régions du pays.
Le gouvernorat du Sinaï Nord
Le Nord-Sinaï, frontalier d’Israël et de Gaza, concentre le risque le plus élevé. Cette zone, souvent signalée comme « à éviter », voit circuler armes et groupes armés dans un contexte de tension extrême. Détournements de véhicules, braquages, enlèvements : les incidents s’accumulent.
Les forces de sécurité, régulièrement ciblées, ripostent par des opérations militaires qui transforment la région en véritable zone de conflit. Un couvre-feu strict (17h à 7h) témoigne de la gravité de la situation. Par ailleurs, cette partie du territoire, tout comme le désert occidental, sert de passage aux trafiquants d’armes qui alimentent également la Libye voisine.
Les stations balnéaires
Le danger ne se limite pas aux zones les plus reculées. Les stations balnéaires, pourtant prisées des voyageurs, attirent aussi l’attention des groupes terroristes. Ces lieux, qui accueillent touristes et expatriés, constituent des cibles privilégiées pour qui cherche à frapper fort et marquer les esprits à l’échelle internationale.
Des attaques ont déjà eu lieu, et si le calme semble revenu par moments, la menace reste persistante. Les modes opératoires évoluent, mais la logique des terroristes n’a pas changé : frapper là où l’impact sera maximal.
Voyager en Égypte aujourd’hui, c’est avancer sur un fil tendu, entre fascination et vigilance extrême. Les paysages restent sublimes, mais derrière les décors de carte postale, la réalité impose ses propres règles. Avant de réserver un billet, mieux vaut regarder la vérité en face, et choisir son itinéraire en toute connaissance de cause.
